Urgence Handicap : le soutien du Défenseur des droits

En mai 2018, deux organisations européennes soutenues par 5 associations françaises dont APF France handicap ont déposé une procédure de réclamation collective devant le Conseil de l'Europe pour faire condamner l’État français pour violation des droits fondamentaux des personnes handicapées. Le Défenseur des droits vient de rendre une décision légitimant cette réclamation.

Rappelant que « la défense des droits des personnes handicapées occupe une place importante dans l’activité de l’institution » et qu’ « en 2020, le handicap était, pour la quatrième année consécutive, le premier motif de saisine du Défenseur des droits en matière de discrimination », le Défenseur des droits reconnaît que « de nombreux progrès ont été réalisés ces dernières années », mais souligne que « d’importantes lacunes subsistent ». Il formule donc plusieurs observations.

Ainsi, il « déplore le manque de mobilisation de l’État pour une véritable promotion des principes et des droits consacrés par la Charte (Charte sociale européenne) et la CIDPH (Convention des Nations unies relative aux droits des personnes handicapées) et, ce faisant, des évolutions du cadre juridique et des pratiques qui devraient en découler. »

Ce modèle fondé sur l’approche par les droits doit aujourd’hui être mis en œuvre dans les politiques publiques.

Sur l’absence d’approche globale et coordonnée des politiques du handicap

Le Défenseur des droits souligne une définition du handicap fondée sur une approche médicale qui « n’identifie pas les barrières environnementales comme un "facteur causal" sur lequel il convient d’agir. »

Il constate des inégalités dans l’accès aux droits, un manque de coordination en matière de statistiques et données sur le handicap et des lacunes en matière de protection contre les discriminations.

Sur l’absence d’accès à une vie autonome incluse dans la société

Le Défenseur des droits pointe les entraves à l’inclusion des personnes handicapées en l’absence d’accessibilité universelle pour les établissements recevant du public, les transports, la voirie, les logements et des systèmes et technologies de l’information et de la communication et « déplore le retard important pris par la France en matière d’accessibilité et les réticences persistantes des pouvoirs publics à appréhender l’accessibilité comme une condition préalable essentielle à la jouissance effective des droits fondamentaux par les personnes handicapées. »

Il pointe aussi les entraves au droit à l’autonomie liées notamment aux problématiques de l’évaluation des besoins de compensation par les Maisons départementales des personnes handicapées, aux limites de la prestation de compensation du handicap et à la différence de traitement à raison de l’âge. Il déclare : « Dans sa mise en œuvre, le droit à compensation connaît de nombreuses limites qui contreviennent aux principes de dignité intrinsèque, d’autonomie individuelle, y compris la liberté de faire ses propres choix, et d’indépendance des personnes handicapées. »

Le Défenseur des droits constate les entraves au libre choix du lieu de vie soulignant que « l’effectivité du libre choix de leur lieu de vie par les personnes handicapées n’est pas, aujourd’hui, garanti par la France ».

Il constate également les entraves à la protection contre la pauvreté et l’exclusion sociale, précisant : « Force est de constater que les personnes handicapées sont fortement exposées à un risque de pauvreté. Selon une enquête de la DREES, parue en mars 2017, le niveau de vie annuel médian des personnes handicapées âgées de 15 à 64 ans était, en 2010, de 2 000 euros de moins que celui des personnes sans handicap. Le niveau de pauvreté est d’autant plus important que la déficience est sévère. En outre, les personnes en situation de handicap sont particulièrement exposées au risque de précarité, en raison, notamment, d’importantes difficultés d’accès et de maintien dans l’emploi. »

L’occasion pour le Défenseur des droits de revenir notamment sur l’injustice que constitue la prise en compte des ressources du conjoint / de la conjointe dans le calcul de l’AAH et de préciser qu’ « à la différence d’autres minima sociaux, l’AAH ne peut être considérée comme une allocation provisoire ou temporaire, eu égard à la durabilité et à l’irréversibilité de certaines situations de handicap. »

En parallèle, concernant l’emploi, il rappelle que « les personnes handicapées sont, plus que les autres, confrontées à de multiples obstacles liés, notamment, aux préjugés sur leur niveau de compétences, à la discrimination et aux réticences des employeurs à prévoir des aménagements raisonnables ».

Le Défenseur des droits pointe aussi les entraves au droit à protection de la santé. Au sujet de l’accès aux soins courants, il met notamment en avant l’inaccessibilité des lieux de soins et les discriminations subies par les personnes handicapées bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) ou de l’aide à l’acquisition d’une complémentaire santé (ACS).

Sur l’impact sur les familles des personnes handicapées

Le Défenseur des droits souligne que « l’absence de réponse adaptée aux besoins des personnes handicapées est souvent lourde de conséquences pour les aidants ». Il point en particulier l’insuffisance des allocations accordées aux parents d’enfants handicapés et les entraves au maintien des liens familiaux liées à l’absence de réponses de proximité.

Pour lire la décision du Défenseur des droits, cliquez ici

 

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